Lettres d'offres et de décisions

Informations sur la décision

Contenu de la décision

LETTRE D'OFFRE

Ottawa, le 21 février 2023

Dossier de la CIDPHN : 120-924-C1

 

PAR COURRIEL

 

Directrice principale intérimaire de la gestion des incidents

Garde côtière canadienne

200, rue Kent

Ottawa (Ontario)  K1A 0E6

 

 

OBJET : Navire à moteur Big T –– Port de Victoria (Colombie-Britannique)

    Date de l'incident : 2020-07-15

 

SOMMAIRE ET OFFRE D'INDEMNITÉ

[1]               Cette lettre est en réponse à une demande d'indemnisation présentée par la Garde côtière canadienne (la « GCC ») concernant un navire de pêche immatriculé sous le nom de Big T (le « navire »). Le navire s'est enfoncé dans l'eau partiellement ou complètement à quelques reprises dans le port de Victoria, en Colombie-Britannique, le ou vers le 15  juillet 2020 (l'« incident »).

[2]               Le 12 juillet 2022, le bureau de l'administrateur de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires (la « Caisse ») a reçu une demande d'indemnisation de la GCC au nom de l'administrateur. En vertu des articles 101 et 103 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6 (la « LRMM »), la GCC a réclamé la somme de 29 006,18 $ pour les frais des mesures d'intervention qu'elle a prises en réponse à l'incident.

[3]               La demande d'indemnisation a été examinée et une décision a été prise concernant les frais réclamés. Par la présente, une offre d'indemnité est faite à la GCC conformément aux articles 105 et 106 de la LRMM.

[4]               La somme de 22 868,59 $ (l'« offre ») est offerte à la GCC en réponse à sa demande d'indemnisation, plus les intérêts prévus par la loi qui seront calculés à la date où la somme offerte sera versée, en conformité avec l'article 116 de la LRMM. Les motifs de l'offre sont exposés ci-après, en plus d'une description de la demande d'indemnisation.

 

DEMANDE D'INDEMNISATION REÇUE

[5]               La demande d'indemnisation comprend un exposé qui décrit les événements relatifs à l'incident. Elle comprend aussi des documents à l'appui des frais réclamés par la GCC. À part quelques exceptions, ces documents confirment la demande d'indemnisation et ne nécessitent aucun commentaire.

 

CONSTATATIONS ET CONCLUSIONS

Le compte rendu des faits de l'incident présenté par la GCC est accepté

 

[6]               L'exposé fourni par la GCC donne une description de l'incident. Il est accepté que l'exposé présente un compte rendu essentiellement exact des événements entourant l'incident de pollution par les hydrocarbures impliquant le Big T. Les faits constatés sont les suivants.

[7]               Le Big T était un (ancien) navire de pêche à coque en bois d'une jauge inconnue. Il avait une longueur de 11,28 mètres et une largeur de 3,35 mètres. La coque était construite en contreplaqué revêti de fibre de verre. Selon le rapport d'inspection produit par Meadows Marine Surveyors Ltd., le Big T était en mauvais état, les joints étaient détérioriés, les bordages étaient pourris, et il y avait d'importants dommages structuraux.

[8]               La capacité exacte des réservoirs de carburant du Big T était inconnue, mais il y avait apparemment 400 litres de diesel à bord du navire au début de l'incident.

[9]               Le 14 juillet 2020, il y a eu un prélude à l'incident, lorsque le propriétaire du Big T a hélé un navire de la GCC dans le port de Victoria. Le propriétaire a dit être tombé en panne de carburant et a demandé à être remorqué. La GCC lui est venue en aide à ce moment-là.

[10]           Le lendemain matin (le 15 juillet 2020), le gestionnaire d'un immeuble adjacent au quai n°1 a communiqué avec la GCC pour signaler de la pollution. Le Big T était apparemment arrivé au quai n° 1 pendant la nuit et il prenait l'eau à un rythme inquiétant.

[11]           La GCC a envoyé une équipe d'intervention environnementale sur les lieux pour évaluer l'état du Big T. Après son arrivée, l'équipe a été avisée par le propriétaire d'un autre navire amarré au quai n°1 qu'il avait déjà pompé l'eau du Big T une fois et qu'il était en train de récupérer ses pompes.

[12]           À un certain moment, le propriétaire du Big T est arrivé sur les lieux. Ses responsabilités en tant que propriétaire d'un navire risquant de causer de la pollution lui ont été expliquées, et il a dit ne pas avoir les moyens de prendre les mesures d'intervention nécessaires.

[13]           La GCC a pris des dispositions pour faire remorquer le navire par un entrepreneur. La GCC a escorté l'entrepreneur durant le remorquage. Après avoir été remorqué, le Big T a été sorti de l'eau.

[14]           Cinq jours plus tard, le 20 juillet 2020, le gestionnaire de l'installation où le Big T avait été placé sur la terre ferme a appelé la GCC pour l'aviser que le propriétaire du navire tentait de le remettre à l'eau. Le propriétaire avait apparemment repeint la coque, mais il n'avait pas effectué les réparations nécessaires pour remettre le navire en état de naviguer.

[15]           La GCC a envoyé deux spécialistes en intervention sur les lieux. Ces derniers ont donné l'ordre au propriétaire de prendre des mesures concernant le Big T. Le propriétaire n'a jamais obéi à cet ordre.

[16]           Peu de temps après le départ des spécialistes en intervention, la GCC a reçu un appel téléphonique. Le Big T venait de causer de la pollution par les hydrocarbures sur les lieux de l'installation où il se trouvait.

[17]           Le 23 juillet, le propriétaire du navire a avisé la GCC qu'il n'avait pas les ressources nécessaires pour réparer le Big T. Néanmoins, il voulait remettre son navire à l'eau dès que possible.

[18]           Un expert maritime a inspecté le Big T le 27 juillet. Les résultats de l'inspection ont été présentés au propriétaire en personne le 8 août. Le propriétaire a réagi en quittant les lieux.

[19]           Le 20 août, la GCC a entamé un processus pour se débarrasser du navire. Celui-ci a été déconstruit le 21 octobre.

La demande d'indemnisation est admissible

[20]           L'incident a causé des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures dans la mer territoriale ou les eaux intérieures du Canada, et il a occasionné des frais pour la prise de mesures visant à répondre aux dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et à prévenir d'autres dommages. La demande d'indemnisation relative à l'incident pourrait donc être admissible.

[21]           La GCC est un demandeur admissible pour l'application de l'art. 103 de la LRMM.

[22]           La demande d'indemnisation a été reçue dans le délai de prescription énoncé au paragraphe 103(2) de la LRMM.

[23]           Certains frais réclamés semblent avoir été engagés pour la prise de mesures raisonnables visant à « prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum » les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par un navire, comme le prévoit la partie 6, section 2 de la LRMM. Par ailleurs, ces frais pourraient avoir été engagés pour la prise de « mesures de sauvegarde », comme le prévoit la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute. Dans l'un ou l'autre cas, certains frais réclamés pourraient être indemnisables.

[24]           Par conséquent, la demande d'indemnisation pourrait être admissible en vertu de l'art. 103 de la LRMM.

[25]           Il est nécessaire de déterminer si les mesures prises par la GCC étaient raisonnables.

Frais individuels

[26]           Les frais de 29 006,18 $ réclamés par la GCC dans sa demande d'indemnisation sont résumés comme suit :

Graphical user interface

Description automatically generated with medium confidence

Figure 1 – Copie d'écran du sommaire des frais

Conclusions concernant la raisonnabilité

[27]           Le Big T présentait une menace réelle, quoique limitée, de causer de la pollution par les hydrocarbures.

[28]           L'intervention initiale, y compris le remorquage du navire, est considérée comme une mesure raisonnable prise en réponse à la pollution par les hydrocarbures. Cependant, la preuve ne montre pas qu'il était raisonnable pour l'équipe de la GCC d'escorter l'entrepreneur qui a remorqué le navire. La GCC a fait valoir qu'elle devait escorter le navire au cas où celui-ci rejetterait des hydrocarbures, mais il semble que l'entrepreneur ait paré à cette éventualité. Étant donné que le besoin pour la GCC d'escorter l'entrepreneur n'a pas été établi, les frais relatifs au remorquage du navire sont rejetés.

[29]           Le rejet de ces frais a pour effet de réduire les frais réclamés pour les déplacements, les salaires, les heures de travail supplémentaires, l'équipement de lutte contre la pollution et l'administration.

[30]           Après avoir été remorqué, le navire a été sorti de l'eau. Il a finalement été déconstruit. Il est souvent difficile de déterminer si les frais engagés pour faire inspecter un navire et ensuite le déconstruire représentent une mesure raisonnable prise en réponse à la pollution par les hydrocarbures. Une fois qu'un navire est sorti de l'eau, il cesse généralement de poser une menace de pollution par les hydrocarbures. Le besoin de déconstruire un navire qui se trouve sur la terre ferme doit être établi par la preuve.

[31]           Dans ce cas-ci, il est admis que le propriétaire du navire était incorrigible. Il s'est obstiné à vouloir remettre son navire à l'eau en dépit du fait que celui-ci n'était manifestement pas en état de naviguer. De plus, l'inspection a montré que le navire présentait un danger, et sa déconstruction a empêché son propriétaire de le remettre à l'eau, ce qui aurait probablement causé un incident de pollution par les hydrocarbures.

[32]           À la lumière de ces conclusions, les frais engagés pour faire inspecter le navire et le déconstruire sont jugés raisonnables. Il est noté que la machine du Big T a été vendue et que le produit de cette vente a servi à réduire le montant de la demande d'indemnisation.

[33]           L'entreposage d'un navire sur la terre ferme n'est pas considéré en soi comme une mesure prise en réponse à un risque de pollution par les hydrocarbures. Comme dans le cas de la déconstruction d'un navire, les frais engagés pour entreposer un navire après l'avoir sorti de l'eau doivent être établis par la preuve. Dans ce cas-ci, il était raisonnable de payer les frais d'entreposage jusqu'au moment où le propriétaire, confronté aux résultats de l'inspection, a quitté le lieu où son navire était entreposé. Par la suite, il n'est pas clair pourquoi le navire a continué d'être entreposé. Les frais engagés jusqu'à cette date (le 8 août) sont acceptés, c'est-à-dire que l'entreposage du navire pendant 25 jours au prix de 37,50 $ par jour (soit un total de 937,50 $) est jugé raisonnable.

SOMMAIRE DE L'OFFRE ET CONCLUSION

[34]           Le tableau ci-dessous présente un sommaire des frais réclamés et des frais acceptés :

Annexe

Frais réclamés

Frais acceptés

1 – Matériel et fournitures

néant

néant

2 – Services contractuels

22 247,69 $

21 617,69 $

3 - Déplacements

144,30 $

41,80 $

4 - Salaires - Personnel à temps plein

886,81 $

886,81 $

5 - Heures de travail supplémentaires - Personnel à temps plein

1 252,79 $

61,62 $

6 - Autres indemnités

néant

néant

7 – Salaires du personnel occasionnel

néant

néant

8 – Frais relatifs aux navires (sauf le carburant et les heures de travail supplémentaires)

néant

néant

9 – Carburant de propulsion des navires

néant

néant

10 – Aéronefs

néant

néant

11 - Équipement de lutte contre la pollution

4 316,16 $

106,66 $

12 - Véhicules

131,14 $

131,14 $

13 - Administration

27,29 $

22,87 $

Total

29 006,18 $

22 868,59 $

Tableau 1 – Sommaire des frais réclamés et des frais acceptés

[35]           Le montant des frais acceptés s'élève à 22 868,59 $. Si l'offre est acceptée, ce montant sera payé en plus des intérêts prévus par la loi qui seront calculés à la date du paiement.

***

[36]           Dans votre examen de l'offre, veuillez prendre note des choix et des délais suivants énoncés à l'article 106 de la LRMM.

[37]           Vous disposez d'un délai de 60 jours, à compter de la réception de l'offre, pour aviser le soussigné si vous l'acceptez. Vous pouvez nous informer de votre acceptation de l'offre par tout moyen de communication, au plus tard à 16 h 30 (heure de l'Est) le dernier jour du délai. Si vous acceptez l'offre, la somme offerte vous sera versée sans tarder.

[38]           Autrement, vous pouvez, dans les 60 jours suivant la réception de l'offre, interjeter appel devant la Cour fédérale. Si vous souhaitez interjeter appel de l'offre, conformément aux règles 335(c), 337 et 338 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, vous pouvez le faire en déposant un avis d'appel établi selon la formule 337. Vous devez le signifier à l'administrateur, qui sera désigné à titre d'intimé dans l'appel. En vertu des règles 317 et 350 des Règles des Cours fédérales, vous pouvez demander une copie certifiée conforme des documents de l'office fédéral.

[39]           La LRMM prévoit que si nous ne sommes pas avisés de votre choix dans le délai de 60 jours, vous serez présumé avoir refusé l'offre. Aucune autre offre ne sera faite.

[40]           Enfin, lorsque le demandeur accepte l'offre d'indemnité, l’administrateur devient subrogé dans les droits du demandeur relativement à l'objet de la demande d'indemnisation. Le demandeur doit alors cesser tous ses efforts de recouvrement, et il doit coopérer avec la Caisse dans ses efforts pour recouvrer par subrogation la somme qu'elle a versée.

Je vous prie d’agréer mes meilleures salutations.

L’administrateur adjoint de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires,

 

 

Mark A.M. Gauthier, B.A., LL.B.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.