Lettres d'offres et de décisions

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LETTRE D'OFFRE

 

Ottawa, le 4 juillet 2023

Dossier de la CIDPHN : 120-944-C1

Dossier de la GCC :

PAR COURRIEL

 

Gestionnaire, Services et planification d’intervention

Garde côtière canadienne

200, rue Kent

Ottawa (Ontario)  K1A 0E6

 

OBJET : Navire de pêche Jolly Roger – Havre d'Ahousaht (Colombie-Britannique)

    Date de l'incident : 2021-02-02

 

SOMMAIRE ET OFFRE D'INDEMNITÉ

[1]               Cette lettre est en réponse à une demande d'indemnisation présentée par la Garde côtière canadienne (la « GCC ») concernant un navire de pêche appelé Jolly Roger (le « navire »), qui a causé un rejet d'hydrocarbures dans le havre d'Ahousaht, en Colombie-Britannique, le ou vers le 2 février 2021 (l' « incident »).

 

[2]               Le 17 janvier 2023, le bureau de l'administrateur de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires (la « Caisse ») a reçu la demande d'indemnisation de la GCC. En vertu des articles 101 et 103 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6 (la « LRMM »), la GCC a réclamé la somme de 88 472,09 $ pour les frais des mesures d'intervention qu'elle a prises en réponse à l'incident.

 

[3]               La demande d'indemnisation a été évaluée et une décision a été prise concernant les frais réclamés. Par la présente, une offre d'indemnité est faite à la GCC conformément aux articles 105 et 106 de la LRMM.

 

[4]               La somme de 18 845,22 $ (l'« offre ») est offerte à la GCC en réponse à sa demande d'indemnisation, plus les intérêts prévus par la loi qui seront calculés à la date où la somme offerte sera versée, en conformité avec l'article 116 de la LRMM. Les motifs de l'offre sont exposés ci-après, en plus d'une description de la demande d'indemnisation.

DEMANDE D'INDEMNISATION REÇUE

[5]               La demande d'indemnisation comprend un exposé qui décrit les événements relatifs à l'incident. Elle comprend aussi un sommaire des frais réclamés par la GCC ainsi que des documents justificatifs.

Sommaire de l'exposé

[6]               La GCC et l'agent des pêches local ont été avisés de l'incident de pollution par les hydrocarbures le 2 février 2021. Le 4 février 2021, le personnel d'intervention environnementale de la GCC a dépêché un bateau de sauvetage sur les lieux de l'incident pour évaluer la situation.

 

[7]               Le 5 février 2021, les agents d'intervention ont observé une irisation d'hydrocarbures provenant du navire et ont décelé une forte odeur de carburant. Alors que les agents tentaient de déployer un barrage flottant, ils ont rencontré le propriétaire du navire, mais ce dernier n'a pas offert sa coopération.

 

[8]               Le 8 février 2021, le personnel d'intervention environnementale a donné au propriétaire, en vertu de l'article 180 de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, l'ordre de prendre immédiatement des mesures pour enlever tous les hydrocarbures ne se trouvant pas dans les réservoirs ou les machines et de fournir un plan écrit pour sortir le navire de l'eau. La GCC lui a donné jusqu'au 11 février pour obtempérer.

 

[9]               Le 10 février 2021, la GCC s'est préparée à faire remorquer le navire, car elle ne s'attendait pas à obtenir une réponse du propriétaire. L'opération de remorquage s'est déroulée au cours des deux jours suivants. Une fois arrivé au port le 12 février, le navire a été sorti de l'eau à l'aide d'une plateforme de levage synchronisé et placé sur la terre ferme jusqu'à ce qu'il puisse être remorqué pour être déconstruit.

 

[10]             Le 17 février 2021, le navire a été inspecté. Il a été remorqué jusqu'à Canal Beach le ou vers le 22 février. Il a été déconstruit et éliminé entre le 22 mars et le 19 avril.

Sommaire des frais

[11]             Les frais de 88 472,09 $ réclamés par la GCC dans sa demande d'indemnisation sont résumés comme suit :

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Figure 1 – Copie d'écran du sommaire des frais

 

CONSTATATIONS ET CONCLUSIONS

La demande d'indemnisation est admissible

[12]             Les frais réclamés sont acceptés en partie. En bref, les frais rejetés sont ceux qui ont été engagés pour déconstruire le navire et qui n'ont pas servi à lutter contre la pollution. Par ailleurs, certains frais ont été réduits à cause d'erreurs de calcul.

 

[13]             L'incident a causé des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures dans la mer territoriale ou les eaux intérieures du Canada, et il a occasionné des frais pour la prise de mesures visant à répondre aux dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et à prévenir d'autres dommages. La demande d'indemnisation relative à l'incident pourrait donc être admissible.

 

[14]             La GCC est un demandeur admissible pour l'application de l'art. 103 de la LRMM.

 

[15]             La demande d'indemnisation a été reçue dans le délai de prescription énoncé au paragraphe 103(2) de la LRMM.

 

[16]             Certains frais réclamés semblent avoir été engagés pour la prise de mesures raisonnables visant à « prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum » les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par un navire, comme le prévoit la partie 6, section 2 de la LRMM. Par ailleurs, ces frais pourraient avoir été engagés pour la prise de « mesures de sauvegarde », comme le prévoit la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures de soute. Dans l'un ou l'autre cas, certains frais réclamés pourraient être indemnisables.

 

[17]             Par conséquent, la demande d'indemnisation pourrait être admissible en vertu de l'art. 103 de la LRMM.

 

[18]             Il est nécessaire de déterminer si les mesures prises par la GCC étaient raisonnables.

L'opération d'intervention de la GCC était raisonnable

[19]             Le Jolly Roger est un navire à moteur en bois de 39 pieds (11,98 mètres), d'une jauge brute de 22,64, construit en 1966. Il est propulsé par un seul moteur diesel Detroit de 110 chevaux-vapeur. Il avait aussi à son bord une machine diesel auxiliaire (génératrice). Le carburant était stocké dans deux réservoirs de 1 100 litres. L'huile hydraulique était stockée dans un seul réservoir de 90 litres, et l'huile lubrifiante se trouvait dans des contenants séparés dans la salle des machines.

 

[20]             Étant donné le rejet évident d'hydrocarbures par le navire et le refus du propriétaire d'agir en conséquence, l'intervention de la GCC était raisonnable et ne nécessite aucun commentaire particulier. Malgré la raisonnabilité des mesures d'intervention, les frais engagés après le 13 février sont généralement rejetés, parce que le navire était sorti de l'eau et que la menace de pollution était donc écartée. Ainsi, les frais engagés après cette date ont servi principalement à déconstruire et à éliminer le navire.

 

[21]             Les frais réclamés pour les services contractuels, énoncés à l'annexe 2, s'élèvent à 80 534,41 $. Cette somme a été payée à deux entrepreneurs : 3 045,00 $ à Building Sea Marine pour l'inspection du navire le 17 février et le rapport d'inspection produit par la suite; et 77 489,41 $ à Canadian Maritime Engineering (« CME ») pour le remorquage, l'entreposage, le pompage de l'eau, la déconstruction et l'élimination du navire.

 

[22]             Les frais payés à Building Sea Marine sont rejetés parce que l'inspection et le rapport n'ont apporté qu'une valeur négligeable à l'intervention de lutte contre la pollution par les hydrocarbures qui était effectivement terminée. L'enquête a plutôt servi à déterminer la valeur résiduelle du navire.

 

[23]             Le montant de 13 662,59 $ est accepté pour le reste des frais des services contractuels payés à CME et à ses sous-traitants. Dans les cas où une marge bénéficiaire a été ajoutée, elle a été réduite de 20 % à 10 %. En général, une marge de 10 % est jugée raisonnable, et il n'y a rien dans les faits qui puisse justifier une marge plus élevée.

 

[24]             En général, les frais des services contractuels engagés depuis la date de l'incident jusqu'au 13 février 2021 sont acceptés, et les frais engagés après cette date sont rejetés parce que la menace de pollution par les hydrocarbures avait alors été écartée. Par la suite, les travaux effectués par les entrepreneurs ont consisté à déconstruire et à éliminer le navire. La preuve ne montre pas que ces travaux étaient des mesures prises en réponse à la menace de pollution par les hydrocarbures. Des exceptions ont été faites pour les frais payés au sous-traitant Terrapure, qui a éliminé les hydrocarbures et l'eau huileuse le 13 mai 2021, et pour les frais d'entreposage du navire les 12 et 13 février, car ces frais avaient rapport à la lutte contre la pollution par les hydrocarbures.

 

[25]             Les frais de déplacement réclamés, énoncés à l'annexe 3, s'élèvent à 807,92 $. Le montant de 766,07 $ est accepté pour les frais engagés les 11 et 12 février, mais ceux engagés le 24 février sont rejetés parce qu'ils n'avaient pas rapport à la lutte contre la pollution par les hydrocarbures.

 

[26]             Les frais de salaire réclamés, énoncés à l'annexe 4, s'élèvent à 2 347,43 $. Le montant de 1 564,95 $ est accepté pour les frais engagés les 11 et 12 février, pour les raisons expliquées ci-haut.

 

[27]             Les frais réclamés pour les heures de travail supplémentaires, énoncés à l'annexe 5, s'élèvent à 4 631,36 $. Le montant de 1 109,02 $ est accepté. La réduction est due au rejet des frais engagés après le 12 février et à une erreur de calcul basée sur un taux de salaire incorrect de 38,32 $. Le taux correct est de 43,44 $ pour l'agent d'intervention Walker et de 38,71 $ pour l'agent d'intervention Harris.

 

[28]             Les frais réclamés pour l'usage de véhicules, énoncés à l'annexe 12, s'élèvent à 65,67 $ et sont acceptés en entier.

 

[29]             Les frais d'administration réclamés, énoncés à l'annexe 13, s'élèvent à 85,41 $. Ce montant a été réduit en conséquence de la réduction des frais de salaire réclamés. Le montant accepté pour les frais d'administration est donc de 58,97 $.

 

SOMMAIRE DE L'OFFRE ET CONCLUSION

[30]     Le tableau ci-dessous présente un sommaire des frais réclamés et des frais acceptés.

Annexe

Montant réclamé

Montant offert

2 – Services contractuels

80 534,41 $

15 280,64 $

3 – Déplacements

807,92 $

766,07 $

4 – Salaires – Personnel à temps plein

2 347,43 $

1 564,95 $

5 – Heures de travail supplémentaires – Personnel à temps plein

4 631,36 $

1 109,02 $

12 – Véhicules

65,57 $

65,57 $

13 – Administration

85,41 $

58,97 $

TOTAL

88 472,09 $

18 845,22 $

Tableau 1 – Sommaire des frais réclamés et des frais acceptés.

[31]     Le montant des frais acceptés s'élève à 18 845,22 $. Si l'offre est acceptée, ce montant sera payé en plus des intérêts prévus par la loi qui seront calculés à la date du paiement.

 

***

[32]     Dans votre examen de l'offre, veuillez prendre note des choix et des délais suivants énoncés à l'article 106 de la LRMM.

 

[33]     Vous disposez d'un délai de 60 jours, à compter de la réception de l'offre, pour aviser le soussigné si vous l'acceptez. Vous pouvez nous informer de votre acceptation de l'offre par tout moyen de communication, au plus tard à 16 h 30 (heure de l'Est) le dernier jour du délai. Si vous acceptez l'offre, la somme offerte vous sera versée sans tarder.

 

[34]     Autrement, vous pouvez, dans les 60 jours suivant la réception de l'offre, interjeter appel devant la Cour fédérale. Si vous souhaitez interjeter appel de l'offre, conformément aux règles 335(c), 337 et 338 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, vous pouvez le faire en déposant un avis d'appel établi selon la formule 337. Vous devez le signifier à l'administrateur, qui sera désigné à titre d'intimé dans l'appel. En vertu des règles 317 et 350 des Règles des Cours fédérales, vous pouvez demander une copie certifiée conforme des documents de l'office fédéral.

 

[35]     La LRMM prévoit que si nous ne sommes pas avisés de votre choix dans le délai de 60 jours, vous serez présumé avoir refusé l'offre. Aucune autre offre ne sera faite.

 

[36]     Enfin, lorsque le demandeur accepte l'offre d'indemnité, l’administrateur devient subrogé dans les droits du demandeur relativement à l'objet de la demande d'indemnisation. Le demandeur doit alors cesser tous ses efforts de recouvrement, et il doit coopérer avec la Caisse dans ses efforts pour recouvrer par subrogation la somme qu'elle a versée.

 

[37]     La présente offre remplace et rétracte celle qui a été faite le 7 juin 2023 en réponse à la demande d'indemnisation. L'offre initiale comportait une erreur de calcul dans les frais acceptés pour les services des entrepreneurs.

 

Je vous prie d'agréer mes meilleures salutations.

Administrateur de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires,

 

Mark A.M. Gauthier, B.A., LL.B.

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