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LETTRE DE REJET

Ottawa, le 26 janvier 2024

Dossier de la CIDPHN : 120-971-C1

Dossier de la GCC :

PAR COURRIEL

Gestionnaire, Soutien opérationnel

Conformité et application de la loi

Garde côtière canadienne

200, rue Kent

Ottawa (Ontario)  K1A 0E6

 

            Par courriel à DFO.CCGERCostRecoveryRSP-RecouvrementdescoutsIESIPGCC.MPO@dfo-mpo.gc.ca

 

OBJET : Navires à moteur Celebrity 180 et Baja 21 – Lévis (Québec)

    Date de l'incident : 2018-09-13

 

SOMMAIRE ET REJET

[1]               Cette lettre est en réponse à une demande d'indemnisation présentée par la Garde côtière canadienne (la « GCC ») concernant les navires à moteur Celebrity 180 et Baja 21 (les « navires »), qui sont entrés en collision le ou vers le 13 septembre 2018, près de Lévis, au Québec (l'« incident »).

[2]               Le 12 septembre 2023, le bureau de l'administrateur de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires (la « Caisse ») a reçu une demande d'indemnisation de la GCC au nom de l'administrateur. La GCC a réclamé la somme de 3 113,40 $ pour les frais des mesures d'intervention qu'elle a prises en réponse à l'incident.

[3]               La demande d'indemnisation a été évaluée et une décision a été prise concernant les frais réclamés. Par la présente, une offre d'indemnité est faite à la GCC conformément aux articles 101 et 103 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime, L.C. 2001, ch. 6 (la « LRMM »).

[4]               La demande d'indemnisation a été évaluée et une décision a été prise concernant les frais réclamés. Il a été déterminé que le délai de prescription prévu à l'alinéa 103(2)a) de la LRMM a expiré avant que la demande d'indemnisation ne soit présentée à l'administrateur. La demande d'indemnisation n'est donc pas admissible en vertu du paragraphe 103(1) de la LRMM.

[5]               Les motifs du rejet de la demande d'indemnisation sont exposés ci-après.

DEMANDE D'INDEMNISATION REÇUE

[6]               La demande d'indemnisation comprend un exposé qui décrit les événements relatifs à l'incident. Un sommaire de l'exposé est présenté ci-dessous.

 

Sommaire de l'exposé

[7]               D'après l'exposé, le 13 septembre 2018 à 22 h 55, la GCC a été avisée que deux bateaux de plaisance à moteur étaient entrés en collision près du Quai Paquet à Lévis, au Québec. Le Baja 21 a coulé rapidement, alors que le Celebrity 180 est demeuré partiellement submergé à la surface de l'eau.

[8]               Les deux navires avaient des réservoirs de carburant internes et ils étaient capables de se déplacer à haute vitesse, ce qui semble avoir contribué à la collision. La violence de la collision a créé un risque de pollution par les hydrocarbures.

[9]               Le NGCC Cap Tourmente a remorqué le Celebrity 180 jusqu'à la marina de la Chaudière, près du pont de Québec. Une bouée repère a été fixée au navire amarré au quai. Peu de temps après, le navire a coulé complètement.

[10]           Le 14 septembre, deux membres du personnel de la GCC se sont rendus sur les lieux de l'incident à 7 h 30. Aucune pollution n'a été constatée. Le propriétaire de la marina et le propriétaire du Celebrity 180 ont élaboré un plan pour renflouer le navire. La GCC a accepté ce plan.

[11]           Le 15 septembre, le navire a été renfloué avec succès, et aucune pollution n'a été observée. Cela a mis fin à l'opération de la GCC.

[12]           L'exposé ne contient aucun renseignement sur les tentatives pour récupérer le Baja 21. Il est présumé que le navire a été abandonné.

CONSTATATIONS ET CONCLUSIONS

La demande d'indemnisation de la GCC pourrait être admissible en vertu du paragraphe 103(1)

 

[13]           Selon le mécanisme prévu au paragraphe 103(1) de la LRMM, un demandeur peut présenter une demande d'indemnisation directement à l'administrateur. Cette demande d'indemnisation doit d'abord être examinée par rapport à plusieurs critères prévus par la loi, avant que le fond de la demande ne puisse faire l'objet d'une enquête et d'une évaluation.

[14]           Dans ce cas-ci, l'incident a causé ou a menacé de causer des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures dans la mer territoriale ou les eaux intérieures du Canada, et il a occasionné des frais pour la prise de mesures visant à prévenir d'autres dommages. La demande d'indemnisation relative à l'incident pourrait donc être admissible.

[15]           La GCC est un demandeur admissible pour l'application de l'art. 103 de la LRMM.

[16]           Certains frais réclamés semblent avoir été engagés pour la prise de mesures raisonnables visant à « prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum » les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par un navire, comme le prévoit la partie 6, section 2 de la LRMM, et ils pourraient donc être indemnisables.

[17]           La demande d'indemnisation est donc admissible, sous réserve du respect de tout délai de prescription applicable. Le délai applicable est celui énoncé au paragraphe 103(2) de la LRMM.

Les demandes d'indemnisation présentées en vertu du paragraphe 103(1) sont assujetties à un délai de prescription

[18]           Le paragraphe 103(1) de la LRMM, tel qu'il existait au moment de l'incident, prévoit ce qui suit :[1]

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[19]           Les demandes d'indemnisation présentées en vertu du paragraphe 103(1) de la LRMM sont assujetties aux délais de prescription énoncés au paragraphe 103(2) :

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[20]           Le libellé du délai de prescription a été examiné dans une décision antérieure de l'administrateur, qui a été rendue le 17 mai 2021 dans l'affaire du navire de pêche Miss Terri. Cette affaire a fait l'objet d'une décision de la Cour fédérale (Canada c. Canada (Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires), 2022 CF 1310 (CanLII)). Les considérations d'ordre juridique énoncées dans ces décisions ont été adoptées et s'appliquent dans le cas présent.

[21]           Pour appliquer le délai de prescription, il faut déterminer s'il y a eu un rejet d'hydrocarbures qui a causé des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Dans l'affirmative, une demande d'indemnisation doit être présentée dans les deux ans suivant la date à laquelle ces dommages se sont produits et dans les cinq ans suivant l'incident qui les a causés.

La demande d'indemnisation a été présentée plus de deux ans après qu'un rejet d'hydrocarbures se soit produit

[22]           D'après l'exposé, le premier jour de l'intervention, il y a eu un véritable risque de rejet d'hydrocarbures à cause de la violence de la collision – qui a finalement causé le naufrage des deux navires. L'exposé mentionne aussi qu'il était difficile de repérer un déversement d'hydrocarbures la nuit. Ces deux points sont jugés exacts.

[23]           Dans ce cas-ci, rien n'indique qu'il y ait eu un rejet d'hydrocarbures. Cependant, ce n'est qu'à 7 h 30 le 14 septembre 2018 – soit le deuxième jour de l'intervention – qu'on a indiqué pour la première fois qu'aucune irisation d'hydrocarbures n'avait été observée.

[24]           Il est improbable qu'aucun des deux navires n'ait causé un rejet d'hydrocarbures après avoir coulé. Bien que cette improbabilité présumée puisse être réfutée par une preuve, ce n'est que plusieurs heures après le naufrage des navires que la première preuve de l'absence d'une irisation d'hydrocarbures ait pu être établie. Il est présumé que les deux navires utilisaient de l'essence comme carburant. Il est donc plausible que tout rejet d'hydrocarbures se serait évaporé au moment où il aurait été possible de faire une observation visuelle à 7 h 30 le 14 septembre 2018.

[25]           Par ailleurs, l'exposé indique qu'à 10 h 30 le 14 septembre 2018, la GCC a été avisée de la présence de pollution qui semblait être due à l'incident. Bien que le personnel de la GCC n'ait pas été en mesure de confirmer cette information de façon indépendante, l'absence de confirmation n'infirme pas la possibilité qu'un tiers ait constaté la présence de pollution due à cet incident, dont on pourrait normalement s'attendre à ce qu'il cause de la pollution.

[26]           Il est aussi noté qu'il n'y a aucune preuve que le Baja 21 ait été renfloué. Il est donc possible que des rejets d'hydrocarbures non observés se soient produits au cours des cinq années entre la date où l'incident est survenu et celle à laquelle la demande d'indemnisation a été présentée.

[27]           Enfin, il est également noté qu'au lieu de fournir des preuves directes, la GCC se fie à un exposé qui semble avoir été rédigé plusieurs années après l'incident. Cela accentue le risque de s'appuyer sur l'absence de constatation d'un rejet pour conclure qu'il n'y a eu aucun rejet d'hydrocarbures, en dépit du fait que les deux navires aient coulé.

[28]           Dans les circonstances, il est conclu qu'il est plus probable qu'improbable qu'un rejet d'hydrocarbures ait été causé par l'un des navires ou les deux. Par conséquent, toute demande d'indemnisation présentée à l'administrateur en vertu de l'article 103 de la LRMM aurait dû être faite au plus tard le 13 septembre 2020.

[29]           La demande d'indemnisation est rejetée.

***

[30]           Dans votre examen de la présente lettre de rejet, veuillez prendre note des choix et des délais suivants énoncés à l'article 106 de la LRMM.

[31]           En vertu du paragraphe 106(2) de la LRMM, le rejet d'une demande d'indemnisation peut être porté en appel devant la Cour d'amirauté, dans les 60 jours suivant la réception de l'avis de rejet de la demande d'indemnisation. La présente lettre contient le rejet d'une demande d'indemnisation. Si vous souhaitez interjeter appel du rejet, conformément aux règles 335(c), 337 et 338 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, vous pouvez le faire en déposant un avis d'appel établi selon la formule 337. Vous devez le signifier à l'administrateur, qui sera désigné à titre d'intimé dans l'appel. En vertu des règles 317 et 350 des Règles des Cours fédérales, vous pouvez demander une copie certifiée conforme des documents de l'office fédéral.

Je vous prie d'agréer mes meilleures salutations.

L'administratrice adjointe de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires,

 

Chiamaka Mọgọ, MPPGA

 



[1] Toutes les références à la LRMM dans la présente lettre se rapportent à la version de la loi qui était en vigueur au moment de l'incident.

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